Comme tout projet, la constitution d’une collection de montres est une aventure qui comporte son lot de réussites et d’échecs. Ce qui commence souvent comme une simple curiosité, voire un divertissement, peut devenir une véritable obsession. Chaque nouveau modèle que l’on découvre nous entraîne dans un puits sans fond rempli d’innombrables références et versions. Les montres légendaires s’entassent jusqu’à ce que l’on se retrouve seul face à son ambition ou à un coffret rempli de garde-temps que l’on ne porte jamais.
À un moment donné, il faut se demander quel est le véritable objet de cette collection : réside-t-il dans la prochaine montre et dans l’histoire qu’elle raconte, ou dans la recherche elle-même ? Toute immersion prolongée dans un domaine aboutit généralement à une certaine forme de recentrage. De nombreux collectionneurs finissent naturellement – et paradoxalement – par épurer leur collection et vendre certains modèles pour conserver uniquement les pièces les plus importantes. Dans de très rares cas, certains parviendraient même à se limiter à une seule montre : la montre ultime, le Graal.
Trouver la montre idéale : allier la forme et la fonction
La question « si vous ne pouviez avoir qu’une seule montre, laquelle choisiriez-vous ? » est un dilemme classique chez les collectionneurs. C’est un exercice presque morbide, un peu comme demander à quelqu’un ce qu’il voudrait pour son dernier repas. Nous frémissons rien qu’à l’idée d’être contraints de choisir une seule montre, puis nous nous empressons d’imaginer ce qu’il se passerait si nous pouvions avoir n’importe quelle montre. Mais par où commencer ?
Peut-être que c’est d’abord une question de sens pratique. Après tout, si vous ne devez posséder qu’une seule montre, il faut qu’elle puisse vous accompagner partout et en toutes circonstances. Elle doit être à la fois robuste et élégante, et passer facilement d’une plongée à un dîner.
À une époque pas si lointaine, les montres devaient être parfaitement assorties aux tenues, conformément aux exigences de l’étiquette. Les montres habillées étaient donc exclusivement réservées aux tenues de soirée. Bien que ce genre de restrictions appartienne désormais au passé, et même si certains se souviennent des règles de cette époque révolue, nous nous faisons également un plaisir de les enfreindre. Il est un modèle qui s’inscrit parfaitement dans ce contexte : la Submariner de Rolex.
Tant qu’à choisir une Submariner, pourquoi ne pas opter pour une version plus singulière ? En explorant l’histoire de la Submariner, on découvre en effet d’innombrables possibilités − mais il nous faut un modèle pour tous les jours. Mieux vaut donc éviter les « Big Crown » et autres « Milsub » à six chiffres. Les puristes privilégieront sans doute un cadran mat, mais celui-ci pourrait sembler trop utilitaire à d’autres. Les cadrans « Gilt » brillants des années 1960 constituent un bon compromis. Difficile d’égaler la beauté pragmatique du cadran d’une Submariner 5513 « Gilt » qui ressemble à une obsidienne avec son fond noir d’encre rehaussé de lettres dorées, ses somptueux index luminescents anciens et son emblématique couronne dorée.
Collectionner les montres : choc et stupeur
Cela dit, qui commence réellement une collection de montres en recherchant le modèle le plus pratique ? Si vous voulez vraiment quelque chose de pratique, d’innombrables possibilités s’offrent à vous, et aucune ne requiert un investissement à cinq chiffres. Et au bout du compte, vous risquez de finir par penser qu’une Submariner est peut-être un choix trop évident. Et si votre véritable but était de vous démarquer ? En d’autres termes, être celui ou celle dont la montre impose le silence quand vous entrez dans une pièce et pousse tout le monde à se demander comment vous avez bien pu vous la procurer.
Alors que l’engouement mondial pour l’horlogerie atteint des sommets ces dernières années, nous sommes submergés de montres « tendance ». Toutes sont hors de portée. Toutes nécessitent de passer des années sur liste d’attente, d’avoir des relations ou un budget suffisant pour financer les études des enfants de tous les revendeurs. Beaucoup de personnes ont de l’argent à dépenser, mais, à partir d’un certain point, la seule manière de vous démarquer est de vous procurer une montre que personne d’autre ne peut avoir. Si tel est votre objectif, rien ne peut surpasser la Nautilus 5711 de Patek Philippe avec le cadran Tiffany & Co.
C’est la montre tendance ultime. Elle était hors d’atteinte dès sa sortie. Cette montre sportive en acier dépourvue de complication, et dont le prix catalogue s’élevait à seulement 30 000 €, dépasse aujourd’hui allègrement les 100 000 €. Mais si vous voulez vraiment bluffer tout le monde et vous offrir la très convoitée signature Tiffany & Co., préparez-vous plutôt à débourser un demi-million. Cela dit, une première impression, ça n’a pas de prix.
Collectionner les montres : trouver LA montre
Considérant l’ampleur que revêtent des considérations telles que : qui porte quelle montre, d’où viennent-elles et combien ont-elles coûté, on ne peut s’empêcher de se demander à qui ses montres s’adressent réellement. Les achetons-nous pour notre plaisir personnel, ou pour impressionner les autres ? S’il n’y a évidemment aucun mal à vouloir posséder un objet spécial ou à célébrer une occasion particulière, à quoi bon acheter une montre si elle ne vous fait pas vibrer ?
Les montres n’ont pas la même signification pour tout le monde. Ce sont des sources de joie et de passion évolutives et variées qui sont toutes aussi valables les unes que les autres. Personnellement, j’aime les montres parce qu’elles racontent des histoires et en inspirent d’autres.
Les montres me font rêver. Elles me permettent d’imaginer des aventures dans des contrées lointaines ou des soirées enchanteresses dans des décors fastueux. À l’instar d’un beau tableau ou d’un poème, la bonne montre peut transporter votre esprit dans une époque ou dans un lieu que vous ne connaîtrez peut-être jamais. Admirer une œuvre d’art mécanique, extrêmement précise, avec ses composants incroyablement complexes, minuscules et parfaitement ouvragés est une expérience réservée à quelques privilégiés.
En conséquence, une seule montre trouve grâce à mes yeux : la 1815 Flyback Chronograph d’A. Lange & Söhne. Même si j’ai eu la chance d’essayer des garde-temps vraiment spectaculaires, y compris des références vintage et des chefs-d’œuvre de l’horlogerie particulièrement rares, aucun ne m’a donné le même sentiment que la 1815 Flyback Chronograph. De la gracieuse simplicité de son cadran symétrique jusqu’à son boîtier solide mais sobre, sa présence au poignet est la définition même du raffinement.
Mais ce n’est pas tout : en retournant la montre, on découvre avec stupéfaction le monument de l’horlogerie qu’est son mouvement. C’est un sentiment indescriptible. Le niveau de dévouement, de passion et de savoir-faire requis pour créer cette montre transparaît dans chacune de ses arêtes et dans la délicatesse de chaque gravure. Inspiré par la beauté de l’objet lui-même et par l’expertise requise pour le créer, je ne peux m’empêcher de rêver aux endroits où une telle montre pourrait être portée et admirée.
L’amour que nous portons aux montres est une chose purement romantique. Lui seul a pu permettre la création d’un chef-d’œuvre tel que la 1815 Flyback Chronograph. Si une seule montre peut inspirer une aussi grande vénération, pourquoi voudrais-je en porter une autre ?
